Force ouvrière vient d’obtenir une victoire importante pour les salariés. La Cour de cassation a en effet jugé que le CDI intérimaires constituait une catégorie nouvelle de contrat de travail, « dérogeant aux règles d’ordre public absolu » qui régissent le CDI d’une part, le contrat de mission d’autre part. Elle en conclut que les signataires de l’accord de branche du 10 juillet 2013 créant le CDII n’avaient pas compétence pour créer un tel accord sans habilitation du législateur. Ou quand les organisations représentatives d’employeurs et de salarié jouent à Frankenstein…
En effet, cette décision révèle combien les signataires de cet accord s’en étaient donné à cœur joie, piochant dans les règles du CDI et du contrat de travail temporaire selon leur envie. Il en résulte un contrat dans lequel le salarié est corvéable à merci, et doit par exemple se tenir à la disposition de son agence pour intervenir dans la demi-journée à 50Km aller ou 1H30 aller en transport en commun. En contrepartie, le salarié bénéficie d’une garantie, la plupart du temps égale au SMIC. Concrètement, un salarié en intermissions ne perçoit aucune indemnisation si ses missions effectuées dans le mois lui ont permis d’obtenir par elle-même ce minimum garanti. Les chiffres de Prism’emploi démontraient l’an passé que cette période d’intermissions touchait 71% des personnes en CDII.
Si de l’extérieur ce CDII ressemble à un CDI, il est différent en de nombreux points. Par exemple, il comprend des possibilités de rupture décuplées : l’intérimaire qui refuse une mission rémunérée 70% inférieure à taux horaire de la précédente commettra une faute qui justifiera son licenciement pour cause réelle et sérieuse…
Si de l’extérieur ce CDII ressemble à un contrat de travail temporaire, il n’est plus éligible à l’assurance chômage, est susceptible de se payer lui-même ses intermissions, et perd ses indemnités de congés payés et de fin mission, soit une perte de 21% de sa rémunération par rapport à un travailleur temporaire.
Ce CDII – prévu par la directive européenne de 2008 comme une dérogation au principe d’égalité de traitement – s’inscrit dans les réformes qui ont détricoté les réglementations du travail en Europe. Il porte atteinte aux droits des salariés en CDII, mais rompt également l’équilibre avec les salariés en contrat de travail temporaire et avec les salariés en CDI.
Autant de raisons qui avaient convaincu la FEC FO et la Confédération d’obtenir la remise en cause de cet accord de branche, comme elle avait auparavant obtenu celle de l’accord portant sur le portage salarial. En effet, Force ouvrière avait obtenu devant le Conseil constitutionnel la remise en cause d’un accord rétrograde pour les droits des salariés concernant le portage salarial, accord négocié déjà par les mêmes acteurs et notamment Prism’emploi. Fort de ce succès, Force ouvrière avait obtenu la création d’une nouvelle branche professionnelle, et négocié une convention collective au bénéfice des salariés portés.
Le chemin demeure encore long pour remettre sur de bons rails les droits des salariés intérimaires. En effet, notre organisation a initialement saisi le Conseil d’Etat, qui devra par conséquent trancher de manière définitive. Par ailleurs, si, selon la Cour de cassation, les signataires de l’accord auraient dû détenir une habilitation du législateur pour réfléchir à un nouveau contrat pour les intérimaires, le précédent gouvernement s’est considéré mandaté par le patronat pour créer un autre CDI « expérimental » pour les intérimaires par voie législative… Frankenstein bis…
Force ouvrière se félicite de cette décision de la Cour de cassation, qui constitue une victoire importante pour les salariés et conforte notre organisation dans ses convictions. Nous continuerons à défendre les droits des salariés intérimaires et de tous les travailleurs.
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